jeudi 24 mai 2012

Au fil des jours #3


Mercredi 23 mai. Il est 22h14, les petits sont couchés, les grands aussi d’ailleurs, les Complies sont dites. L’électricité est coupée, les bougies sont allumées, et mon ordi commence à utiliser sa batterie. Dehors la pluie s’est arrêtée, mais le ciel couvert nous laisse un ciel uniformément noir. Les alentours sont envahis de la mélodie des différents chants d’insectes, seuls à occuper la jungle, le village et le centre endormis. La nuit, si crainte des karens, est leur domaine. Il y a aussi certainement un ou deux « hommes barbus », c’est gens qui se font passer pour des karens, trompés par leur barbe, quasi-inexistante chez les karens, qui cherche à enlever ceux qui osent s’aventurer dans le village. Peut être quelques esprits tournent aussi dans le village revenant tourmenter quelques connaissances de leur ancienne vie. La nuit est un moment fabuleux ici. Aucune ville ne vient déranger le silence de la jungle. Pas une lumière mise à part les 3 du temple qui nous fait face. Un ciel, immense, et captivant, tel un aquarium lorsqu’il est dégagé. Je ne le verrai plus ainsi. La saison des pluies est là. Alternance de grosses averses, orages, bruines, ciel couvert et menaçant. Les insectes se réfugient dans les maisons pour y trouver abris et surtout nourriture. Mes réserves d’Oréo (sans citer de marque), de pâte à tartiner, de pain de mie et de bonbons sont souvent attaqué par les fourmis. Chaque soir ma lampe est prise d’assaut par une myriade de moucherons, fourmis volantes, sauterelles, et autres insectes volants avant que le groupe électrogène qui fourni l’électricité ne soit coupé. Tout ce petit peuple se réfugie alors sur les seules sources de lumières restantes, l’écran de mon ordi ou les deux flammes de mes bougies, se risquant ainsi à se bruler les ailes. Les pertes sont nombreuses, encourageant les fourmis à venir faire leurs courses dans ma chambre. Un Totei vient de chanter. La chauve sourie qui partage ma chambre a déjà montrer le bout de son nez avant de repartir très vite. Elle n’est pas la bienvenue ici. Sur mon bureau s’entasse des factures non trier résultats de près d’une semaine d’absence. Mon guide de Thaï (nouveau défi après le karen) côtoie un chapelet, des lignes d’écriture de l’alphabet thaï un album photo, mon opinel (sans le pain ni le pâté) , une demi douzaine de stylo, une enveloppe sans lettre dedans, un conserve de crème de  marron un calendrier thaï, du fil, une aiguille, et mon ordi. Il faudrait vraiment que je re-re-re-re-…-re-range ce bureau. Sur mes étagères ma réserve personnelle de gâteaux. Au dessus de mon bureau, un dictionnaire karen-thaï-français-anglais, celui d’anglais, qui m’a plus servi à écraser les blattes de 10cm, « Les Robes Rouges », Caritas in Veritate, la Vie de Marthe Robin, Petites histoires du Vatican, Le Nouveau Testament, mon carnet de chant karen, La Bible de Jérusalem, mon carnet de route, le n°2 encore vierge, les carnets de compta, de gestion de l’atelier couture, et de karen.

Demain il faudra que j’aille mettre à jour la production de l’atelier couture. Que je commence d’ailleurs à faire mes courses. Puis je commencerai à rédiger ma lettre au prochain volontaire pour le tuilage, j’irai surement faire un tour dans une maison. Une rencontre. Un sourire. Un bonjour de la main. Une visite au pensionnat des sœurs. Puis le reste de la journée sera occupé à lire, discuter avec les gens de passage, prendre un verre, des gâteaux avec le staff, peut être un peu de travaux agricole. Dormir un peu. Puis il faudra aussi faire la compta. Une lessive, le rangement de la chambre. Les enfants seront là, une heure de Taccro (sport local) ou de foot (sport moins local, bien que certaines règles diffèrent un peu…). La douche, le repas, la prière, l’étude. Puis le ballet des insectes recommencera, et le ciel sera toujours aussi noir. Ce n’est pas de la routine, c’est une vie unique.

Aujourd’hui, j’ai obtenu un visa de 15 jours en faisant un allez retour en Birmanie. Dans 2 semaines il faudra refaire la démarche (20 min). Mais pour le moment je profite. Avancant d’un pas lourd et lent pour rester disponible.
Bonne nuit – 23h00.